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Trudeau a dit non à confier les pleins pouvoirs en immigration au Québec

Le premier ministre Justin Trudeau a refusé sur toute la ligne de confier au Québec l’ensemble des pouvoirs en immigration, comme l’avait exigé François Legault jeudi.

L’élu libéral est sorti d’une rencontre « productive » avec son homologue sans grande nouvelle à annoncer vendredi. Interrogé sur la demande qui lui avait été transmise la veille par M. Legault, il n’y est pas allé par quatre chemins : « Non, nous n’allons pas donner plus de pouvoirs en immigration. »

« Le Québec a déjà plus de pouvoirs en immigration que n’importe quelle autre province — parce que c’est très important de protéger le français —, mais, moi, ce qui m’intéresse, c’est de faire fonctionner le système d ‘une meilleure façon. Ce n’est pas une question de qui a le contrôle de quoi », a expliqué M. Trudeau lors d’une courte mêlée de presse devant les journalistes.

La veille, en période de questions, François Legault avait affirmé qu’il profiterait de sa réunion au sommet avec M. Trudeau pour exiger les pleins pouvoirs en immigration. Sans quoi, le premier ministre québécois a calculé « évaluer ses options ». En conférence de presse, peu après l’entretien avec son homologue vendredi, M. Legault a réitéré que plusieurs avenues étaient sur la table, mais qu’il était « trop tôt » pour dire lesquelles. « Quand on va être prêts, on va vous le dire », at-il indiqué.

Le chef du gouvernement caquiste considère le rapatriement des pleins pouvoirs en immigration comme primordial « pour protéger la langue et l’identité de la nation québécoise ». Or, il a déjà écarté la tenue d’un référendum sectoriel en immigration. « Je ne pense pas qu’on a besoin de faire un référendum pour demander aux Québécois s’ils souhaiteraient qu’on rapatrie les pouvoirs à Québec. Je pense que c’est consensuel », avait-il dit en février. Il s’est également montré hésitant vendredi quant à la possibilité de rouvrir l’Accord Canada-Québec, qui régit le partage des pouvoirs entre les deux gouvernements en matière d’immigration et que le Québec peut choisir de renégocier quand il le veut.

« Il faut quand même comprendre que cette entente-là a des avantages pour le Québec », s’est justifié M. Legault vendredi. « J’ai d’ailleurs souvent entendu mes collègues des autres provinces dire : « Pour ce qui est des immigrants permanents, vous, vous avez pleine juridiction sur le choix des immigrants économiques. Donc, on veut être certain que dans les négociations avec Ottawa, on ne perd pas ces pouvoirs-là, qu’on ne recule pas. »

Pas de nouveaux fonds

Malgré le refus d’Ottawa sur le partage des pouvoirs, François Legault estime avoir réussi à avancer sur plusieurs fronts vendredi. Selon lui, M. Trudeau a démontré une ouverture à ce que le Québec puisse décider du nombre de travailleurs temporaires admis sur son territoire et qu’une « partie » d’entre eux « soient refusée » au moment du renouvellement de leur permis de travail . M. Legault a convenu avec son vis-à-vis de faire une rencontre d’ici la fin du mois de juin prochain pour faire un suivi sur ces demandes.

En clair, le gouvernement Legault a demandé vendredi un droit de regard sur le nombre de certificats d’acceptation du Québec délivrés pour les programmes fédéraux de travailleurs temporaires — au premier chef, le Programme de mobilité internationale. Selon le premier ministre, « ça donnerait au Québec une espèce de droit de veto sur tous les travailleurs temporaires ».

« Déjà, ça serait un gain, at-il dit. Peut-être que M. Trudeau n’appelle pas ça un rapatriement de pouvoirs, mais si on était capable […] de dire : «aucun travailleur temporaire n’est accepté par Ottawa sans d’abord avoir eu l’accord du Québec», ce serait déjà un pouvoir important. »

Dans les dernières semaines, le bureau du premier ministre caquiste avait expressément demandé au fédéral qu’une rencontre soit organisée afin d’aborder le sujet chaud de l’immigration. En janvier, M. Legault avait également écrit une lettre à son homologue pour exiger une meilleure répartition des demandeurs d’asile dans tout le Canada. « Nous sommes tout près du point de rupture », avait-il soutenu.

Le Québec souhaite toujours voir apparaître dans ses coffres environ 1 milliard de dollars en compensation pour les coûts générés par l’accueil de demandeurs d’asile depuis 2021. S’il se dit conscient de la « pression » exercée par l’afflux de demandeurs d’asile ‘asile sur « le budget du Québec, mais aussi sur les systèmes de santé et d’éducation », M. Trudeau n’a pas annoncé de nouvelles sont vendredi. « On va parler plus directement des chiffres en rencontre de travail », a souligné le premier ministre canadien, une information confirmée ensuite par M. Legault.

En janvier, le gouvernement fédéral avait débloqué une cagnotte de 100 millions de dollars pour financer un programme visant à loger les personnes en attente d’asile hébergées au Québec.

À Montréal vendredi, pour une sortie sur la réforme de la carte électorale, le chef du Parti québécois, Paul St-Pierre Plamondon, a déploré le « non clair et rétentant » du premier ministre Trudeau sur les pouvoirs en immigration. « Ce qui est triste, voire humiliant, c’est que c’est une demande qui est pleinement légitime d’un gouvernement qui a obtenu le mandat fort qu’il demandait », a-t-il lancé.

Dans un communiqué de presse, la co-porte-parole de Québec solidaire, Émilise Lessard-Therrien, a pour sa part condamné l’incapacité de François Legault à « aller chercher plus de pouvoirs pour le Québec ». « Il est également incapable de faire fonctionner le système d’immigration au bénéfice des personnes immigrantes et du Québec », at-elle exprimé.

« En plus d’improviser dans le cadre des grands projets et des budgets, François Legault n’est pas un pro de la négociation avec le fédéral », a soutenu le porte-parole du Parti libéral du Québec en matière d’immigration, André A. Morin.

Une entente avant la fin du mois ?

Les premiers ministres Trudeau et Legault étaient réunis en décembre rencontre officielle pour la première fois depuis 2022 vendredi. Outre l’immigration, les deux chefs en ont profité pour discuter de santé et de croissance économique. La question des compensations pour les programmes fédéraux d’assurance dentaire et médicaments a été abordée, tout comme celle des transferts en santé immobilisés à Ottawa.

Sur ce dernier point, M. Trudeau s’est dit « confiant » de voir une entente conclure avec Québec sur les transferts en santé « avant la fin du mois ». En attendant la signature d’une entente bilatérale, le gouvernement canadien retient toujours quelque 900 millions de dollars en transferts en santé destinés au Québec.

Selon nos informations, cependant, les discussions se sont accélérées dans les derniers jours. Tant à Ottawa qu’à Québec, on est maintenant sur la bonne voie pour conclure une entente asymétrique estime bientôt. Québec accepterait de partager certaines de ses données et Ottawa permettrait que les sous soient dépensés comme le gouvernement Legault le désire.

Quant aux négociations sur les programmes d’assurance maladie du fédéral, M. Trudeau assure avoir eu de « bonnes discussions » avec son homologue vendredi « sur si on peut arrimer nos programmes et s’assurer qu’il ya un partage et un respect des compétences ».

Avec Zacharie Goudreault

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