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Le physique maniaque de Leonard Rossiter a été une révélation dans le théâtre britannique | Théâtre

je a vu pour la première fois Leonard Rossiter dans le rôle de Fred Midway dans la pièce de David Turner Semi-Detached au Belgrade, Coventry en 1963 et ce fut une révélation. Olivier avait joué le même rôle à Londres avec un réalisme discret. Rossiter, qui, comme le personnage, avait travaillé dans le secteur des assurances, nous a présenté un machiavel maniaque des Midlands. Les jambes aux articulations raides jaillissaient comme des pistons, les bras tournaient comme un moulin à vent fou furieux, les yeux avaient un regard dur de basilic. C’était le genre de jeu d’acteur physiquement expressif que l’on voyait rarement dans le théâtre britannique à cette époque.

La renommée n’a frappé Rossiter qu’avec sa performance sensationnelle dans The Resistible Rise of Arturo Ui de Brecht. Créée à Glasgow en 1967, la production de Michael Blakemore a mis deux ans pour atteindre Londres, où Brecht était considéré comme un poison au box-office. Mais la pièce de Brecht, qui assimile le parti nazi aux gangsters de Chicago et voit Hitler comme un voyou démoniaque, offre l’un des grands rôles vedettes, que Rossiter a saisi avec avidité.

Ce qu’il y a apporté, c’est son don pour le grotesque et sa capacité à trouver un équilibre parfait entre le menaçant et l’absurde. L’entrée de Rossiter, qui impliquait un saut dramatique à travers un écran circulaire semblable à un cirque, était rendue comique par la façon dont des morceaux de papier s’accrochaient obstinément à ses dents. C’est le prélude à un spectacle où férocité et farce ne sont jamais très éloignées. Invité à quitter un restaurant par un capitaliste rayé, la tête de Rossiter s’est dressée en spirale comme celle d’un cobra sur le point de frapper avant de lever son lourd chapeau haut de forme avec une politesse exagérée.

Cadeau pour le grotesque… Leonard Rossiter et Del Henney dans The Resistible Rise of Arturo Ui. Photographie : –

Le point culminant est survenu dans la scène où Arturo prend des leçons de comportement auprès d’un acteur shakespearien vétéran. Instruit de marcher sur la pointe des pieds, Rossiter a levé les jambes au pas de l’oie embryonnaire. On lui a dit de se tenir debout, les mains croisées de manière neutre devant lui, il a saisi son entrejambe avec une intensité enragée. Lorsqu’on lui a appris à s’asseoir, il a essayé un geste d’autorité de style romain dont il s’est rendu compte qu’il était plus impressionnant si le bras était déplié, réalisant ainsi le tout premier salut nazi. C’était un jeu d’acteur brillant et j’ai été fasciné, la seule fois où j’ai interviewé Rossiter, quand il m’a dit que, même s’il était reconnaissant pour le rôle, il détestait politiquement Brecht.

Le paradoxe est que Rossiter était, d’une certaine manière, l’incarnation vivante de la conviction de Brecht selon laquelle « l’acteur doit se faire observer se tenant entre le spectateur et le texte ». Vous l’avez vu lorsqu’il a joué le clochard dans The Caretaker d’Harold Pinter en 1972. Alors que Donald Pleasence, à l’origine du rôle, a donné une performance naturaliste et était suffisamment plausible pour sortir dans la rue en mendiant lors du tournage de la pièce à Hackney, Rossiter a clairement a présenté le personnage comme un décrocheur travailleur et un fantasme né rêvant toujours d’arriver à Sidcup.

Ce dernier point est une des clés du jeu de Rossiter : il avait un génie particulier pour incarner des personnages en proie à une idée fixe. Dans Make and Break (1980) de Michael Frayn, il était un vendeur bourreau de travail totalement lié à son métier : il scrutait même les pochettes de disques de Beethoven et les brochures bouddhistes comme s’il s’agissait de bilans d’entreprises. Et dans sa dernière interprétation du rôle de l’inspecteur Truscott dans Loot de Joe Orton (1984), il a donné une étude définitive d’un détective obsessionnel et dément : alors qu’il retirait son chapeau pour prouver qu’il était un maître du déguisement, ses yeux avaient la lueur folle d’un la police Walter Mitty.

Même son propriétaire, Rigsby, dans l’émission télévisée Rising Damp, était un homme hanté en permanence par la frustration sexuelle. Qu’il incarne des monstres ou des hommes soi-disant ordinaires, Rossiter avait une capacité inégalée à suggérer qu’une touche de manie rend le monde entier proche.

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