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Le dessous caché d’un iceberg : la meilleure photographie de Laurent Ballesta | Art et conception

UNé gamin, j’étais fasciné par les documentaires de Jacques Cousteau. Il n’y avait rien d’autre comme eux – c’était un rendez-vous hebdomadaire à la télévision. Ma famille n’habitait pas très loin de la mer et, même si cette côte n’était pas propice à la plongée, mon frère et moi avions l’habitude de faire comme si nous explorions sous les vagues, comme Cousteau. Mes parents nous disaient de ne pas aller dans l’eau juste après le déjeuner et nous avertissaient de rester à l’écart des crabes et des méduses. Quand j’étais adolescente, je me plaignais du fait qu’ils ne voulaient aller à la plage que pour profiter du soleil. Je pensais que si mon père était plongeur ou si nous avions grandi dans un endroit comme la Polynésie française, j’aurais pu apprendre bien plus.

Mais maintenant, je réalise que cela aurait probablement tué le sens de l’aventure qui me anime encore aujourd’hui. Dans mes photographies, j’essaie de me concentrer sur les créatures mystérieuses dont nous savons peu ou rien. Les océans regorgent d’animaux et de lieux qui n’ont jamais été photographiés, mais les atteindre constitue souvent un défi, parfois dangereux. Je pense cependant que les choses mystérieuses inspirent plus de respect que celles qui sont simplement belles. L’envie d’être face à quelque chose de plus grand que moi, quelque chose de bizarre, d’étrange ou d’effrayant, quelque chose que je ne comprends pas, est ce qui me pousse à explorer.

En 2010, je suis devenu le premier plongeur à photographier un cœlacanthe vivanton pensait autrefois que le poisson avait disparu à l’époque des dinosaures. Ce spécimen particulier se trouvait dans une grotte à 120 mètres sous la baie de Sodwana, au large de la côte est de l’Afrique du Sud, où les cœlacanthes sont connus sous le nom de gombessa. Depuis lors, mon projet Gombessa en cours a inclus plusieurs autres expéditions, au cours desquelles j’ai photographié des mérous en train de frayer, 700 requins en train de se nourrir frénétiquement sous la pleine lune et des écosystèmes des grands fonds sous la glace de l’Antarctique.

Notre QG de Gombessa 3, l’expédition Antarctique, était la base scientifique Dumont d’Urville. Toute l’équipe était consciente de l’immense privilège d’avoir accès à ces installations pendant trois mois alors que la base ne peut accueillir que 100 personnes par an, malgré les milliers de demandes des chercheurs. Chaque jour, nous revenions avec des images uniques de la biodiversité des grands fonds.

La métaphore de la partie cachée de l’iceberg est courante. Alors que nous étions en Antarctique, j’ai commencé à me demander si, pour une fois, il serait possible de montrer littéralement cela – juste la partie cachée. Il y a des icebergs gigantesques pour lesquels vous ne pouvez tout simplement pas faire cela, car ils mesurent des kilomètres de long et se déplacent, il n’y a donc aucun moyen d’obtenir une photo panoramique. Mais j’ai trouvé ce petit dont le sommet était coincé dans la banquise à la surface de la mer, donc il ne bougeait pas. De plus, le fond n’atteignait pas le fond de l’océan, ce qui signifie que la lumière pouvait passer en dessous. La lumière sur la face de l’iceberg était parfaite. C’est tout à fait naturel. Les plongeurs avec leurs torches sont là juste pour donner une idée de l’échelle. C’était comme si je prenais une photo dans un studio.

Même s’il était petit par rapport aux standards d’un iceberg, il était encore beaucoup trop grand pour tenir dans le cadre d’un gros plan d’un appareil photo, et plus loin, je ne pouvais pas obtenir une image claire. Ma solution était de couler une très longue ligne avec des poids jusqu’au fond de l’océan et de créer un gigantesque filet devant l’iceberg à la distance souhaitée. Ensuite, j’ai dû nager le long de ce filet en prenant une photo de chaque carré de sa grille avec mon objectif grand angle jusqu’à ce que j’aie capturé toute la scène.

Il nous a fallu deux jours, mon ami et moi, pour préparer le filet, puis deux ou trois heures de plongée pour prendre toutes les photos. Les 147 photographies ont été assemblées par ordinateur pour créer l’image finale – c’était la première fois que nous voyions la masse entière, qui s’étendait au-delà de notre champ de vision lorsque nous nageions à ses côtés. Ce fut un grand moment – ​​quand il est apparu dans son intégralité à l’écran. La plongée la plus longue que nous avons faite au cours de cette expédition a duré cinq heures, dans une eau à une température de -1,8ºC. Il a fallu des mois pour que la douleur quitte mes orteils. Près de 10 ans plus tard, ils sont toujours endommagés – mais des images comme celle-ci valent la peine de souffrir.

Cette image figure dans 60 ans de photographe animalier de l’année : Comment la photographie animalière est devenue un art, disponible en version cartonnée à l’adresse suivante : nhmshop.co.uk

Photographe Laurent Ballesta. Photographie : © Andromède Océanologie Gombessa Expéditions

CV de Laurent Ballesta

Né: Montpellier, France, 1974
Qualifié: Biologiste marin
Influences: Jacques Cousteau
Point culminant : « Gagnant quatre fois du prix du photographe animalier de l’année, décerné par le National History Museum de Londres »
Astuce : « N’essayez pas de créer des images meilleures que celles réalisées par d’autres photographes – essayez simplement de rendre les vôtres différentes »

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