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Présenté pour la première fois en 1939, «Les règles du jeu» de Jean Renoir fait si souvent des listes des plus grands films de tous les temps que son classement est aussi potentiellement difficile à expliquer. Ce film français ne bouscule pas les conventions de la narration cinématographique aussi radicalement que «Citizen Kane» le fit en 1941, ni n’a l’attrait obsessionnel qui le rend « Vertige » si infiniment renouvelable. Bien qu’une partie de la réputation du film Renoir repose sur son utilisation d’une mise au point profonde et de longues prises, il n’a inventé aucune de ces techniques – et le travail de la caméra à lui seul n’est pas la raison pour laquelle il perdure.
Mais «Les règles du jeu» est parmi les films les plus parfaitement équilibrés: un film sur la discrétion qui en est à tous égards un modèle. Le générique d’ouverture appelle cela un «fantasme dramatique», mais ce n’est pas simplement un drame, une farce ou une tragédie. C’est une comédie de mœurs (même si le texte d’introduction nie expressément cette description) dans laquelle les mœurs agissent comme un canevas. L’étiquette et l’apparat excusent les personnages de traiter honnêtement les questions de cœur, et peut-être même les aveuglent aux ténèbres envahissantes de la Seconde Guerre mondiale.
«Les règles du jeu» ont été créées en France alors qu’Hitler menaçait l’Europe. Dans ce contexte, la critique comique de Renoir de ce qu’il a appelé une «société en déclin» prend un air de terreur. Le chaos et la mort de l’acte final semblent être plus que des moyens pratiques de clore la procédure.
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La description du tracé ne fait qu’effleurer la surface. L’aviateur André Jurieux (Roland Toutain) a commis l’erreur de s’engager dans un grand geste romantique: il est présenté en arrivant en France après avoir effectué un vol transatlantique en solitaire pour rivaliser avec celui de Charles Lindbergh. Mais après l’atterrissage, il constate que Christine (Nora Gregor), la femme mariée pour qui il a effectué le vol – et dont il a probablement surestimé l’affection – n’est pas là pour le saluer. Il exprime son mécontentement à un reporter de radio, et Renoir coupe à Christine l’écoute de l’émission en direct. Elle et son mari, Robert (Marcel Dalio), un marquis, en discutent peu après.
Pourquoi André n’aurait-il pas pu accepter calmement son rôle de héros national, demande son ami Octave (Renoir), peu de temps après qu’André ait fait tomber leur voiture dans un fossé? De toute évidence, Christine n’aurait pas pu venir le saluer. «C’est une femme du monde», dit Octave, «et la société a des règles strictes.» La façon dont les personnages observent ces règles – ou plutôt, les plie sans les enfreindre – devient le fil conducteur du film.
Robert, pour sa part, comprend à quel point André doit se sentir désemparé. «Il avait risqué sa vie», dit Robert à Christine avec une sorte de suffisance fringante. «Comment as-tu pu lui refuser ce petit signe d’affection? L’infidélité n’est pas exactement mal vue dans les cercles du marquis; il continue avec Geneviève (Mila Parély), dans une aventure qui fait beaucoup parler d’elle. Pourtant, il est ému de mettre fin au badinage en raison de la démonstration inattendue de fidélité de Christine à son égard.
Le souci de Robert et Christine de garder les apparences a un sous-texte: chacun est perçu comme un étranger – Robert, pour son héritage juif, dont les serviteurs se moquent quand il est hors de vue, et Christine, parce qu’elle est la fille d’un chef d’orchestre autrichien de premier plan. , la mettant à l’écart de la société française.
Octave, qui a grandi aux côtés de Christine à Salzbourg et dit qu’il la voit comme une sœur, peut évoluer de manière transparente dans les mondes du film. Il persuade Robert d’inviter André à une escapade à la campagne; Robert concède que sa femme et son admirateur «pourraient aussi bien se voir et en parler». De toute évidence, la seule façon de résoudre le triangle amoureux est de rapprocher tout le monde, parmi d’autres membres de la haute société, et de faire en sorte que tout le monde fasse preuve de bon comportement.
«La chose horrible dans la vie est la suivante: chacun a ses raisons», dit Octave à Robert, après avoir demandé à Robert de lui lancer l’invitation. C’est la ligne la plus célèbre du film, et représente une idée sur laquelle «Les règles du jeu» s’engage à la fois comme principe dramatique – le film se plaît à éclairer les défauts de ses personnages et les petits moments d’hypocrisie – et comme stratégie esthétique.
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