Parmi les personnes atteintes de psychose, les thèmes délirants restent cohérents lors des rechutes et des épisodes psychotiques ultérieurs, selon les résultats d’une étude publiée dans JAMA Psychiatrie.
La compréhension de la trajectoire des symptômes de la psychose est un domaine de recherche essentiel, en particulier pour développer des interventions efficaces. Bien que les délires répondent moins bien au traitement que d’autres symptômes psychotiques, l’évolution longitudinale des délires – en particulier leur persistance et leur stabilité thématique – reste sous-explorée.
Les chercheurs ont donc mené une étude longitudinale et naturaliste, au sein d’un service d’intervention précoce pour les personnes atteintes d’un premier épisode psychotique, afin de déterminer comment le contenu du délire reste stable depuis le début jusqu’aux périodes de rémission des symptômes et de rechute. Les principaux critères d’intérêt étaient le pourcentage de patients présentant des délires de base qui ont connu une rémission des symptômes et une rechute ultérieure, ainsi que la persistance des thèmes délirants pendant la rechute. Les autres critères d’intérêt comprenaient la stabilité des thèmes délirants, la présence de délires polythématiques et les facteurs prédictifs de la persistance du délire.
Les chercheurs ont recueilli des données entre janvier 2003 et mars 2018 auprès du Programme de prévention et d’intervention précoce en psychose de Montréal, au Québec. Les participants admissibles étaient des personnes âgées de 14 à 35 ans qui avaient vécu leur premier épisode de psychose affective ou non affective et qui n’avaient jamais été exposées à des médicaments antipsychotiques pendant plus d’un mois.
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Ces résultats ont des implications substantielles pour les conceptualisations de la stabilité et de la persistance des délires, la consolidation et la circonscription des symptômes à travers les épisodes, et le besoin de cohérence entre les récits cliniques, épidémiologiques et phénoménologiques du contenu des délires.
Au total, 636 participants ont été inclus, dont 591 présentaient des délires de base. Les participants souffrant de délires avaient un âge moyen (ET) de 23,9 (4,72) ans, 70,6 % (n = 417) étaient des hommes, 29,4 % (n = 174) étaient des femmes et 0,2 % (n = 1) s’identifiaient comme non binaires. Notamment, 521 (88,2 %) participants présentaient plusieurs thèmes de délire et 382 (70,5 %) ont reçu un diagnostic de délire non affectif psychose.
Parmi l’échantillon analytique complet (N = 636), 79,2 % des participants ont connu une rémission des symptômes. Cependant, 37,9 % ont rechuté ultérieurement, dont 89,5 % une fois et 10,5 % deux fois. Dans le sous-groupe de 591 patients qui présentaient des délires au départ, 76 % ont obtenu une rémission et 40,5 % ont rechuté.
Les chercheurs ont constaté que 19,5 % des participants souffrant de délires au départ ont montré une persistance des délires, dont 17,6 % ont montré une persistance des thèmes. Parmi les participants ayant connu une seule rechute, 71 % ont présenté des délires de niveau seuil et 90,4 % ont conservé au moins un thème délirant initial.
Au départ, les thèmes délirants les plus répandus – en particulier les délires de persécution – persistaient pendant la rechute psychotique. Cependant, les chercheurs ont noté qu’il y avait généralement moins de thèmes délirants pendant la rechute par rapport à l’épisode initial. Les épisodes de rechute présentaient une gravité globale des symptômes plus faible, avec une réduction de l’anxiété, dépressiontendances suicidaires et hallucinations par rapport aux scores de base.
L’analyse multivariée a révélé que des facteurs tels que le statut relationnel, l’appartenance à une minorité visible, l’âge, la catégorie diagnostique et les hallucinations initiales ne prédisaient pas la récurrence des délires. Les délires de persécution sont notamment apparus comme le seul prédicteur significatif de la persistance des thèmes pendant la rechute.
« Ces résultats ont des implications substantielles pour les conceptualisations de la stabilité et de la persistance des délires, la consolidation et la circonscription des symptômes à travers les épisodes, et le besoin de cohérence entre les récits cliniques, épidémiologiques et phénoménologiques du contenu des délires », ont conclu les chercheurs.
Les limites de l’étude comprennent le manque de données sur la période d’évaluation de 2 ans et l’incapacité d’évaluer le contenu des délires idiosyncratiques au niveau individuel.
Cet article a été publié à l’origine sur Conseiller en psychiatrie