Les confinements liés au COVID-19 sont liés à un vieillissement cérébral accéléré chez les adolescents, en particulier chez les filles
Une étude longitudinale de neuroimagerie menée auprès d’adolescents a révélé que leur cerveau avait subi un vieillissement accéléré entre 2018 et 2021, pendant les confinements liés à la pandémie de COVID-19. Cela a été mis en évidence par un amincissement accru de la région corticale du cerveau chez ces individus. En moyenne, les cerveaux des filles ont vieilli de 4,2 ans supplémentaires au cours de cette période, tandis que ceux des garçons ont vieilli de 1,4 ans supplémentaires. Ces résultats ont été publiés dans le Actes de l’Académie nationale des sciences et mettre en lumière l’impact neurologique potentiel de l’isolement social prolongé et du stress pendant la pandémie.
L’âge cérébral fait référence à l’état biologique du cerveau, qui peut différer de l’âge chronologique d’un individu. Des techniques avancées de neuroimagerie telles que l’IRM, l’EEG ou la TEP, combinées à des algorithmes d’apprentissage automatique, sont utilisées pour évaluer l’âge du cerveau en analysant les modèles structurels, fonctionnels et de connectivité du cerveau. Des facteurs clés tels que le volume de matière grise, l’épaisseur corticale et l’intégrité de la substance blanche sont mesurés pour estimer l’âge du cerveau. Lorsque l’âge du cerveau dépasse l’âge chronologique, cela peut indiquer des risques accrus de déclin cognitif, de problèmes de santé mentale ou de troubles neurologiques.
L’amincissement cortical, la réduction progressive de l’épaisseur de la couche externe du cerveau, fait partie du développement normal du cerveau des adolescents. Il reflète des processus tels que l’élagage synaptique et la myélinisation, qui affinent le cerveau pour un fonctionnement plus efficace. Cependant, ce processus peut s’accélérer dans des conditions défavorables, notamment le stress chronique, le manque de sommeil, une mauvaise alimentation et des problèmes médicaux comme l’hypertension ou le diabète. L’amincissement cortical accéléré est associé à une plus grande vulnérabilité aux troubles neuropsychiatriques, notamment à l’anxiété et à la dépression, en particulier à l’adolescence.
L’étude, dirigée par Neva M. Corrigan de l’Université de Washington, visait à étudier l’impact des confinements pandémiques de COVID-19 sur la structure cérébrale et le vieillissement des adolescents. Les gouvernements du monde entier ont mis en œuvre des mesures de confinement en 2020 et 2021 pour atténuer la propagation du virus. Ces restrictions ont bouleversé la vie quotidienne, obligeant les individus à rester chez eux et limitant les interactions sociales. Pour les adolescents, dont le développement dépend fortement des relations avec leurs pairs et des expériences sociales, cet isolement a probablement introduit un stress important.
L’étude a recruté 87 adolescents, âgés de 9 à 17 ans, qui ont subi une IRM cérébrale en 2018 dans le cadre d’un projet antérieur sur le développement typique du cerveau. Ces participants sont revenus pour des analyses de suivi trois ans plus tard, fin 2021 et début 2022. Les chercheurs ont comparé les changements d’épaisseur corticale au cours de cette période avec des modèles statistiques prédisant des schémas de vieillissement normaux sur la base des données pré-pandémiques.
Les résultats ont montré que les participants ont connu un amincissement cortical plus rapide que prévu au cours des trois années. Chez les garçons, l’amincissement supplémentaire correspondait à 1,4 année de vieillissement cérébral accéléré. Les filles, cependant, ont présenté une accélération plus prononcée, leur cerveau montrant 4,2 années supplémentaires de vieillissement.
L’amincissement du cerveau des filles était répandu, affectant plusieurs régions des hémisphères et des lobes, y compris les zones essentielles au traitement social et émotionnel, telles que le gyrus fusiforme et le cortex temporal supérieur. Chez les garçons, l’amincissement était plus localisé, affectant principalement les régions de traitement visuel. Cette disparité peut être liée au fait que les adolescentes dépendent davantage des relations avec leurs pairs pour obtenir un soutien émotionnel, ce qui a été perturbé pendant les confinements.
« En résumé, les résultats de la présente étude suggèrent que les changements de mode de vie associés aux confinements liés à la pandémie de COVID-19 ont entraîné un écart par rapport au schéma normal d’amincissement cortical au cours du développement de l’adolescent et que les effets ont été plus dramatiques chez les femmes que chez les hommes. Comme l’amincissement cortical accéléré au cours du développement cérébral est associé à un risque accru de développement de troubles neuropsychiatriques et comportementaux, les résultats de cette étude soulignent l’importance de fournir une surveillance et un soutien continus aux adolescents qui ont connu les confinements pandémiques », ont conclu les auteurs de l’étude.
L’étude apporte une contribution importante à la compréhension scientifique des répercussions possibles des confinements liés au COVID-19. Il convient toutefois de noter que la conception observationnelle de l’étude ne permet pas de tirer des conclusions sur les causes et les effets. L’amincissement cortical accéléré observé peut avoir été influencé par des facteurs autres que les confinements, tels que les différences individuelles dans les niveaux de stress, la dynamique familiale ou les conditions préexistantes.
De plus, la taille de l’échantillon était relativement petite, ce qui limitait la généralisabilité des résultats. Les données comportementales, telles que les évaluations détaillées des niveaux de stress, des habitudes de sommeil et de l’activité physique des participants pendant les confinements, n’ont pas été collectées. Ces mesures pourraient fournir des informations précieuses sur les facteurs spécifiques à l’origine du vieillissement accéléré du cerveau. De futures études portant sur des échantillons plus vastes et plus diversifiés et une collecte de données complète sont nécessaires pour s’appuyer sur ces résultats.
Le journal, « Les effets du confinement du COVID-19 sur la structure cérébrale des adolescents suggèrent une maturation accélérée qui est plus prononcée chez les femmes que chez les hommes,» a été rédigé par Neva M. Corrigan, Ariel Rokem et Patricia K. Kuhl.