Le panache de la photographie
Cogitations mensuelles de Thierry Maindrault
On dit que je suis grincheux, passéiste, pessimiste et que je ne comprends rien aux splendeurs des images contemporaines. Pas de généralisations hâtives, cela n’est vrai que pour ceux qui sortent de nulle part ou d’une boite au ventre rempli de composants électroniques. Je serais aveugle aux chefs-d’œuvre du nouveau « Leonardos » émergent. Je serais insensible aux miracles bienfaisants de la rémunération collective (avec leurs offices d’obscurs calculs de répartition) des droits d’auteur. Je serais sectaire si je ne m’enthousiasme pas pour les généreuses subventions publiques. pour encourager des projets, souvent sans tête ni queue. Seul l’intérêt premier se résume au montant de l’argent public dépensé. Je resterais insensible à la mauvaise qualité des œuvres exposées en masse, partout et sous toutes les latitudes. Je serais dubitatif, voire ulcéré, face à ces vagues d’une culture mondialisée qui vomit des milliards de photographies généralement d’une débilité insupportable.
Toutes ces remarques, je les accepte pleinement, car tous ces points et quelques autres doivent nous interpeller, nous interroger, nous motiver à des réflexions sincères sur l’avenir de la Photographie, de l’Art, de la Culture, leur impact sur notre évolution et sur le patrimoine confié à nos descendants.
Pourtant, ne dit-on pas qu’il serait imprudent de jeter le bébé avec l’eau du bain !
Alors que s’ouvre à Paris l’un des plus grands rassemblements de photographies de notre planète, mêlé d’un soupçon de gigantisme et d’autodestruction, il reste de bonnes raisons d’espérer. Particulièrement pour l’optimiste rationnel que je garde malgré tout. Il existe une solution à chaque problème, à condition que l’origine de la difficulté soit correctement identifiée.
L’idée de travailler avec la lumière n’est pas près de disparaître. Dans tous les métiers, la lumière est devenue une partenaire incontournable et miraculeuse. La médecine, l’industrie, la communication, la sécurité sont soumises à ces quelques ondes qui jouent si bien avec la matière. Pour leur usage photographique, les familles de lumière utilisent une immense palette de techniques très variées. C’est probablement cette gamme qui ramènera à moyen terme les photographes à la raison et certaines productions photographiques dans le monde du dialogue et de la création.
Quelques signes encourageants apparaissent avec l’arrivée de nouvelles œuvres sur le marché. Embourbé dans les réseaux sociaux narcissiques et dans le foisonnement de tirages sans âme, le public se questionne lorsqu’il se retrouve devant des images dignes de ce nom, dès que l’occasion se présente. S’ils regardent différemment, s’ils interagissent avec la photographie, s’ils trouvent de l’émotion ; alors l’auteur est sur la bonne longueur d’onde. A partir du moment où le lecteur se différencie, s’éduque, s’émerveille devant une image, récente ou ancienne, la photographie de qualité reprend ses droits.
Par exemple, je souhaite que ces futurs mariés recherchent des photographes sur des dossiers avec références. Pour eux, pas question de faire comme leurs amis avec leur bricoleur équipé d’un drone et d’un smartphone. Les sujets ne veulent plus se lamenter sur les images catastrophiques d’une journée mémorable.
Ce concepteur de sites Web a besoin de véritables photographies professionnelles pour ses créations. ne pas passer des heures perdues sur des retouches impossibles qui ne font pas partie de son métier.
Les bonnes écoles de formation ont réinvesti dans des équipements et des locaux couvrant plusieurs technologies photographiques. On parle de moins en moins de soutenir des pseudo-créations susceptibles d’attirer l’attention sur internet. La pédagogie se concentre sur l’apprentissage de tout ce qui permettra d’obtenir dans le futur des résultats probants.
La diversité technique est également de retour. Certains appellent cela des marchés de niche. Pourtant, des films, des produits, de nouveaux appareils, tous très éloignés de la photographie numérique, sont à nouveau disponibles. Les anciens manuels techniques sont réédités.
Les grands laboratoires proposent à nouveau des prestations qui avaient disparu de leurs catalogues. Toutes les formes de soins, toutes les formes de réalisation sont de retour. La difficulté consiste à trouver du personnel compétent, après les départs des seigneurs du laboratoire, sans disciples. Une génération entière est passée à côté. Avec un peu de patience, les jeunes les plus talentueux reprendront le flambeau.
Même les techniques numériques cherchent à juste titre leur place dans ce renouveau et c’est tout à fait normal. Ce n’est pas parce que la majeure partie de l’humanité est tombée dans le piège que nous devrions crier – haro – à propos de nouvelles possibilités très intéressantes pour faire de la photographie.
Nous savons tous qu’il n’existe pas de mauvaises techniques pour créer une image photographique. Il y a d’excellents photographes, de bons photographes et des moins bons photographes. Il y a aussi une multitude de personnes qui n’ont rien à voir avec un appareil photo. Même s’il s’agit de soigner leurs quelques maux psychologiques.
Thierry Maindrault, le 8 novembre 2024
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