Le ministre du Travail du Québec, Jean Boulet, envisage de modifier la loi pour accorder au gouvernement plus de pouvoir d’intervention dans les conflits de travail.
Dans son bilan de fin d’année, Boulet a ouvertement exprimé son intérêt pour une législation fédérale qui donne à Ottawa le pouvoir de mettre fin aux grèves ou aux lock-out et d’imposer l’arbitrage.
Ce pouvoir discrétionnaire — l’article 107 du Code canadien du travail — a récemment été utilisé pour mettre fin à des conflits de travail dans les chemins de fer du pays, dans trois grands ports et à Postes Canada.
Même si cette loi ne peut être utilisée que par Ottawa pour intervenir dans des conflits de compétence fédérale, Boulet suggère qu’une loi similaire pourrait être utile pour les litiges au Québec.
«Il y a eu des conflits de travail qui nous ont préoccupés et ont eu des répercussions, par exemple, dans la transformation alimentaire, au cimetière Notre-Dame-Des-Neiges, dans l’éducation et dans le transport en commun», a-t-il déclaré.
Mais Boulet affirme qu’il cherche toujours les moyens de mettre fin à ces différends et de trouver des solutions permettant aux parties de sortir de l’impasse.
Le ministre envisage également d’élargir la liste des services essentiels au Québec, ce qui pourrait empêcher certains travailleurs de s’absenter complètement de leur travail.
« Peut-être devrions-nous réfléchir à de nouveaux critères pour déterminer ce qui constitue un service à maintenir en cas de conflit de travail, de grève ou de lock-out », a-t-il déclaré.
Craintes de porter atteinte au droit de grève
Caroline Senneville, présidente du Confédération des syndicats nationaux (CSN), l’une des plus grandes fédérations syndicales du Québec, se dit surprise des propos de Boulet et exhorte la ministre à la prudence avant de suivre l’exemple d’Ottawa.
Elle note que le recours à l’article 107 du Code canadien du travail est contesté devant les tribunaux et pourrait un jour être jugé inconstitutionnel.
Senneville craint que les nombreuses interventions du gouvernement fédéral dans les conflits de travail puissent miner le droit de grève au Canada et conduire à davantage de conflits.
« Ce que nous avons vu… dernièrement, c’est que les employeurs disent : ‘Je n’ai pas besoin de négocier parce qu’il va y avoir un arbitrage’, donc ce n’est pas constitutionnel parce qu’il y a eu deux arrêts très importants de la Cour suprême qui disent que les syndicats ont le droit d’avoir l’employeur avant eux négocie de bonne foi », a-t-elle déclaré.
Senneville affirme que la CSN souhaite s’impliquer dans les discussions autour des intentions du ministre, mais que le syndicat « ne participera jamais à des discussions qui entraîneraient la perte d’un droit durement acquis et protégé par la Constitution canadienne ».