Le Canada n’en fait pas assez pour empêcher « le génocide du peuple palestinien », a martelé la rapporteuse spéciale des Nations Unies sur la situation des droits de l’homme dans les territoires palestiniens occupés depuis 1967, Francesca Albanese, en visite au pays .
En conférence de presse au parlement, Mme Albanese a déploré un accueil froid de la classe politique canadienne, dont les membres ont ou bien refusé de la rencontrer, ou bien choisi de retirer leur invitation.
Il semble que mes mots et ma lecture candide des faits, du droit international et de la justice, et mon insistance pour parler honnêtement du génocide qui se déroule à Gaza et du risque sérieux qu’il se propage dans la région effrayerait la classe politique et ceux qui sont au pouvoir, incluant les pouvoirs économiques et financiers
a tonné la rapporteuse spéciale dans une allocution d’une trentaine de minutes chargée de critiques envers le gouvernement canadien.
Quand il y a des violations du droit international aussi sérieuses que celles-là, et franchement, Israël en commettait avant le 7 octobre, […] il faut cesser toutes formes d’assistance, de soutien et de collaboration avec la conduite illégale. C’est pour cela que le Canada doit tout revoir, et tout ce qui est jugé dangereux pour les droits des Palestiniens doit être suspendu immédiatement.
Selon la rapporteuse spéciale des Nations unies, le droit international exige que :
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les licences d’exportation d’armes vers Israël soient « toutes annulées » ;
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le Canada fait preuve de « transparence sur les transferts indirects d’armes par des pays tiers » ;
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les accords économiques avec Israël « soient revus de manière urgente » ;
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les « réfugiés palestiniens et les personnes déplacées de force soient acceptés sur le territoire canadien et reçoivent les protections appropriées » ;
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le Canada « nomme les choses telles qu’elles sont », soit qu’« un génocide est en cours contre le peuple palestinien » et que « l’occupation israélienne des territoires est illégale », et qu’il « agit en conséquence ».
Mme Albanese a déclaré les crimes commis par les militants du Hamas contre des civils israéliens lors de l’assaut meurtrier du 7 octobre 2023, qui doivent être punis, à-elle soutenue.
L’ambassadeur d’Israël au Canada s’est dit profondément troublé par le fait que la rapporteuse spéciale des Nations Unies, Francesca Albanese, ait reçu une tribune [sur la colline du Parlement] pour exprimer ses positions tendancieuses et antisémites concernant la guerre entre le Hamas et Israël
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Transfert d’armes
La ministre canadienne des Affaires étrangères, Mélanie Joly, a affirmé en septembre dernier qu’aucune arme ou composante d’armes fabriquées au Canada ne serait envoyer
dans la bande de Gaza. La politique est claire. Il n’y a pas d’armes ni de composantes d’armes canadiennes qui vont se retrouver à Gaza. Un point c’est tout
a soutenu Mme Joly, précisant que cela concernait aussi les envois indirects d’armes.
Des manifestants réunis devant le social de l’entreprise General Dynamics, à Repentigny, ont demandé en septembre dernier d’annuler les ventes d’armes de fabrication québécoise à Israël. (Photo d’archives)
Photo : Radio-Canada / Ivanoh Demers
La ministre faisait alors référence aux États-Unis, qui ont approuvé la vente d’un lot d’armes à Israël d’une valeur totale de 20 milliards de dollars américains (27,7 milliards de dollars canadiens). Cette vente comprend un contrat pour des munitions de fabrication québécoise, y compris 50 000 obus de mortier fabriqués par l’entreprise General Dynamics Produits de défense et Systèmes tactiques–Canada, dont le siège social et l’usine de munitions se trouvent à Repentigny, au Québec.
Notre objectif est de faire en sorte qu’il n’y ait pas d’armes ni de composantes d’armes canadiennes envoyées à Gaza, et c’est pourquoi je suis en contact avec la compagnie General Dynamics
avait déclaré la ministre Joly en point de presse, ajoutant que depuis le 8 janvier dernier, il n’y a pas eu de nouveaux permis qui ont été émis pour l’envoi d’armes ou de composantes d’armes en Israël
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Elle dit avoir suspendu une trentaine de permis existant durant l’été.
Position canadienne
Le Canada soutient le droit d’Israël à vivre en paix avec ses voisins à l’intérieur de frontières sécuritaires et reconnaît son droit à assurer sa propre sécurité
indique Affaires mondiales Canada. En vertu du droit international, Israël est en droit de mettre en œuvre les mesures nécessaires, en conformité avec les droits de la personne et le droit international humanitaire, afin de protéger ses citoyens contre les attaques de groupes terroristes.
Le Canada reconnaît le droit des Palestiniens à s’autodéterminer et appuie la création d’un État palestinien souverain, indépendant, viable, démocratique et doté d’un territoire d’un seul tenant. Le Canada est disposé à reconnaître un État palestinien au moment le plus propice à une paix durable, même si celle-ci n’est pas la dernière étape vers la réalisation de la solution à deux États.
Le Canada souscrit sans réserve à l’objectif d’une paix globale, juste et durable au Moyen-Orient et à la création d’un État palestinien coexistant avec Israël dans la paix et la sécurité.
Génocide en direct
À Gaza, nous sommes forcés de regarder alors que les bombardements constants d’Israël, leurs tireurs d’élite et leurs tirs d’artillerie continuent de n’épargner personne
a déclaré Francesca Albanese en conférence de presse.
La rapporteuse spéciale de l’ONU a enquêté sur la situation durant un an pour produire son rapport intitulé L’effacement colonial par le génocidedans lequel elle dénonce ce qu’elle décrit comme le « premier génocide colonial diffusé en direct » et qui cible le peuple palestinien.
C’est clair pour moi que les Canadiens veulent plus de clarté, d’intégrité et des actions concrètes de leur gouvernement sur les atrocités que nous voyons tous se dérouler en Palestine.
Le crime de génocide consiste en des actions accompagnées par l’intention de détruire en totalité ou en partie un groupe national, ethnique, racial ou religieux en tant que tel
a déclaré Mme Albanese en conférence de presse, ajoutant : Alors que la destruction du groupe est interprétée en des termes physiques et biologiques, des cas variables où on s’en prend à la fondation même du groupe, incluant la destruction de l’esprit, son désir de vivre et la vie elle-même.
Donc, lorsqu’on essaie de déterminer l’intention étatique de détruire un groupe, il faut garder en tête que le génocide est un processus, pas une action unique, qui inclut une pluralité d’actions et d’acteurs. Donc, la clé est d’identifier le fil d’intentions dans cette conduite collective
à-elle précisée.
La destruction de la bande de Gaza est telle que les Palestiniens n’auront plus rien lorsque la guerre cessera, déplore-t-elle.
Cependant, le mot génocide
fait débat au sein de la communauté internationale pour qualifier la situation dans la bande de Gaza.
Avec l’appui d’autres pays, l’Afrique du Sud a déposé une requête auprès de la Cour internationale de justice (CIJ) pour faire cesser les actions militaires israéliennes à Gaza. Pretoria affirme qu’Israël s’est livré, se livre et risque de continuer à se livrer à des actes de génocide
contre le peuple palestinien à Gaza.
Israël n’a pas catégoriquement que ses opérations puissent s’apparenter à un génocide. Son porte-parole a plutôt accusé le Hamas d’avoir organisé une campagne de génocide
à l’endroit des Israéliens. La CIJ ne s’est toujours pas prononcée à ce sujet.
Avec les informations de Rania Massoud