La France lance une campagne anti-corruption avant les Jeux olympiques de Paris 2024
Paris (AFP) – A l’approche des Jeux olympiques de Paris en juillet et août, les procureurs français travaillent sur quatre enquêtes sur d’éventuels actes répréhensibles, mais ces enquêtes sont-elles le signe de problèmes ou de véritables efforts pour lutter contre la corruption ?
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Andy Spalding, universitaire et auteur qui étudie la corruption dans les « méga-événements » sportifs tels que les Jeux olympiques ou la Coupe du monde de football, estime que les autorités françaises montrent qu’elles sont sérieuses dans leur volonté d’organiser des Jeux propres.
Trois enquêtes préliminaires portent sur d’éventuels favoritismes dans l’attribution d’une vingtaine de contrats valant plusieurs dizaines de millions d’euros, tandis qu’une quatrième – révélée le 6 février par l’AFP – scrute la rémunération de l’organisateur en chef Tony Estanguet.
Dans un entretien avec l’AFP, Spalding, professeur à la faculté de droit de l’université américaine de Richmond, a expliqué l’histoire troublée de la corruption olympique et pourquoi il pense que les Jeux de Paris pourraient marquer le début d’une « nouvelle ère » d’un sport international plus propre. .
Question : Quand la corruption aux Jeux olympiques a-t-elle pour la première fois attiré l’attention du grand public ?
« Les Jeux olympiques d’hiver de Salt Lake City en 2002 ont été la première fois où des preuves tangibles de corruption ont été rendues publiques. Avant 2002, nous savions qu’il y avait de la corruption. Mais nous ne pouvons pas le prouver et le monde est largement résigné à la corruption.
Puis, à la fin des années 1990, il y a ce qu’on appelle parfois « l’éruption de la corruption » – une période au cours de laquelle tout d’un coup le monde commence à accorder beaucoup d’attention aux problèmes de corruption.
Il existe de nouvelles conventions internationales ; il y a une explosion d’érudition. Il y a des scandales et des démissions, de nouvelles initiatives coercitives.
Ce que nous avons vu lors des Jeux qui ont suivi, ce ne sont pas seulement des incidents de corruption, mais une corruption systémique. La Russie, avec les Jeux olympiques d’hiver de Sotchi en 2014, en est probablement l’exemple le plus flagrant, où des milliards de dollars auraient été détournés au cours de l’événement. »
Question : Quel a été l’effet sur le mouvement olympique ?
« Les scandales de corruption ont énormément porté atteinte à l’image du Comité international olympique. Cela a été particulièrement évident en 2015, lors de l’attribution des Jeux d’hiver de 2022, lorsque le seul candidat crédible, la Chine, était un pays qui n’avait pratiquement aucune tradition de sports d’hiver.
D’autres pays n’en voulaient tout simplement pas en raison de la corruption systémique et des dépassements de coûts.
Le CIO a besoin d’un modèle économique durable, c’est pourquoi il a adopté des réformes, s’attaquant aux deux différentes composantes de la corruption : l’une est la corruption au niveau du CIO, en particulier au sein du comité exécutif, ce qui signifie qu’il a fallu réformer le processus de candidature.
Ensuite, la deuxième étape a consisté à lutter contre la corruption au niveau du pays hôte : le comité d’organisation, la municipalité, le Comité National Olympique. »
Question : Une partie de cette approche consiste en une nouvelle « clause anti-corruption » dans le contrat avec la ville hôte des Jeux olympiques. Qu’est-ce que c’est?
« La France est le premier pays à être soumis à une obligation contractuelle exécutoire d’adopter des programmes de conformité anti-corruption. Personne ne sait encore ce que cela signifie, mais à commencer par Paris, en passant par les Jeux d’hiver de 2026 et Los Angeles en 2028, nous aurons ces programmes. obligations contractuelles à chaque fois.
Vous commencez par une disposition contractuelle. La prochaine étape consiste à fournir des indications sur ce que cela signifie. Ensuite, nous avons besoin d’opérations et de mesures d’exécution en cas de rupture de contrat. Lorsque toutes ces étapes seront franchies, la clause aura alors un sens.
Lorsqu’une convention ou un statut est adopté, il y a un délai avant son application. La loi qui a été le catalyseur de l’application mondiale de la lutte contre la corruption, la loi américaine sur les pratiques de corruption à l’étranger, était en vigueur depuis 25 ans avant que nous n’en fassions quoi que ce soit. »
Question : En quoi Paris 2024 est-il différent ?
« Il est vraiment important de noter que la France a obtenu le Jeux olympiques en 2017, l’année même où elle adopte une nouvelle loi anti-corruption très innovante, Sapin II. Cela a créé une exigence autonome obligeant les entreprises à adopter des programmes de conformité anti-corruption pour prévenir des phénomènes tels que la corruption, le favoritisme ou l’extorsion. Dans la plupart des pays du monde, la conformité anti-corruption n’est pas légalement requise.
La France a appliqué tout cela aux Jeux olympiques. Ils placent le comité d’organisation sous la juridiction du nouveau Agence Française Anti-Corruption (AFA) dont le seul objectif est d’aider les entreprises à élaborer des programmes de conformité.
Et en examinant le comité d’organisation, l’AFA a découvert des problèmes qui pourraient constituer des signaux d’alarme. Cela envoie des signaux d’alarme aux procureurs, et ceux-ci mènent actuellement une enquête.
De quoi est-ce la preuve ? Corruption systémique ou initiative anti-corruption innovante qui fonctionne vraiment bien ? Cela dépend si quelque chose est vérifié. Et si c’est vérifié, quelle gravité.
Je pense que Paris pourrait marquer le début d’une nouvelle ère en matière d’application des lois anti-corruption et de mesures anti-corruption lors des Jeux. »