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Eileen Gray à travers l’objectif : un film met en lumière l’architecte et sa vision du modernisme

Un voyage à travers l’héritage d’Eileen Gray et de sa maison la plus célèbre de la Côte d’Azur, « E.1027 – Eileen Gray et la maison au bord de la mer », des réalisateurs Beatrice Minger et Christoph Schaub, invite les spectateurs dans l’héritage à plusieurs niveaux de l’époque pionnière. Architecte irlandaise et sa vision unique du modernisme. Conçue à la fin des années 1920, la villa incarne non seulement le génie architectural de Gray, mais porte également l’ombre d’un récit difficile impliquant Le Corbusier et Jean Badovici. À travers leur docufiction, Minger et Schaub éclairent le travail révolutionnaire de Gray et critiquent les récits dominants de domination masculine dans l’histoire moderniste.

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Le film a été initialement conçu comme un projet sur Le Corbusier, mais à mesure que Minger et Schaub approfondissaient leurs recherches, ils ont découvert l’histoire inédite de Gray et se sont sentis obligés de modifier l’orientation du film. En réfléchissant à ce tournant, Minger explique : « on pensait initialement que le film parlerait de Le Corbusier, mais lorsque Christoph et moi avons commencé le processus de recherche, nous sommes tombés sur cette histoire impliquant lui et Eileen Gray et sommes tombés amoureux d’elle. » Ce moment charnière a permis aux réalisateurs de recadrer le récit du point de vue de Gray, révélant les complexités et les tensions entre les deux architectes sous un jour nouveau et nuancé.

Avec l’aimable autorisation du Festival du film d’architecture et de design

La relation entre Gray et Le Corbusier reste une source d’intrigues et de débats. Attiré par le charme étrange de E.1027, Le Corbusier s’est rendu dans la maison à plusieurs reprises et a finalement peint des peintures murales sur ses murs sans le consentement de Gray – un acte largement considéré comme une violation de son œuvre. Le film de Minger réexamine cet événement à travers les yeux de Gray, dans le but de regarder au-delà de cet acte infâme pour explorer des implications plus larges. « L’idée était d’aller au-delà de la vandalisation de la maison par Le Corbusier, en montrant sa perspective sur l’ensemble de la situation dans ce contexte historique », explique-t-elle. Pour Minger, le conflit transcende l’acte physique ; il incarne l’imposition par Le Corbusier de ses idéaux et, symboliquement, la domination masculine sur l’expression créative de Gray. « Ce désir masculin de conquérir tout ce qui est inconnu en dit long sur le colonialisme », ajoute Minger, soulignant à quel point les enchevêtrements personnels de ces architectes font écho à des questions plus vastes de pouvoir et de contrôle.

Villa E-1027 d’Eileen Grey. Photo ©Manuel Bougot

Le parcours de Gray résonne aujourd’hui non seulement pour ses réalisations architecturales, mais aussi pour rappeler les défis auxquels les femmes continuent d’être confrontées dans des domaines dominés par les hommes. E.1027 était plus qu’une maison ; c’était un manifeste de la philosophie du design de Gray et de son dévouement au modernisme. En inscrivant l’histoire de Gray dans un contexte moderne, le film relie le passé et le présent, soulignant l’impact durable de la dynamique de genre dans les domaines créatifs.

Les cinéastes apportent une approche théâtrale à leur fiction, en incorporant des décors scéniques qui élargissent le récit. « Nous avons utilisé cette scénographie qui ressemble à une scène de théâtre à la fois pour étendre le récit au-delà de l’espace cinématographique et aussi pour représenter le moment où Le Corbusier peint les murs de la maison », explique Minger. Cette approche stylisée amplifie la tension dramatique de l’histoire, transformant le décor en une arène symbolique où les idéaux de Gray affrontent l’influence dominante de Le Corbusier, offrant ainsi une expérience à plusieurs niveaux au public.

Villa E-1027 d’Eileen Grey. Photo ©Manuel Bougot

Le tournage à E.1027 lui-même présentait des défis uniques. En tant que site patrimonial, les règles de préservation de la villa imposaient des limites strictes à l’équipage. « Nous n’avions pas beaucoup de temps pour tourner dans la maison », se souvient Minger. « En tant que bâtiment patrimonial, il y a certaines règles que nous devons suivre… Ce n’était pas facile, mais certainement très intéressant d’avoir l’opportunité d’être là pour tourner certaines scènes. » Pour surmonter ces contraintes, les réalisateurs ont utilisé l’infographie pour reconstruire les environs de la villa tels qu’ils apparaissaient à l’époque de Gray, mêlant authenticité historique et narration visuelle.

En fin de compte, « E.1027 – Eileen Gray et la maison au bord de la mer » transcende les récits traditionnels, invitant les spectateurs à une exploration multidimensionnelle de l’héritage de Gray, de sa vision et de ses luttes. En mettant en lumière les facettes émotionnelles et symboliques de son conflit avec Le Corbusier, Minger et Schaub non seulement récupèrent la place qui revient à Gray dans l’histoire de l’architecture, mais incitent également le public à réfléchir à l’influence durable du genre et du pouvoir dans le design.

Villa E-1027 d’Eileen Grey. Photo ©Manuel Bougot

Le film a valu à Beatrice Minger et Christoph Schaub le prix de la meilleure mise en scène au Festival du film de Zurich 2024 et a été présenté en avant-première aux États-Unis au Festival du film d’architecture et de design à New York en septembre de cette année. Claire Brodka et Romullo Baratto d’ArchDaily ont eu l’occasion de parler à Minger à cette occasion.



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Harold Fortier: