Comment organiser une COP climatique, selon le grand-père de l’accord de Paris

Paris, 2015 et les avertissements concernant la dégradation du climat se faisaient de plus en plus forts.

Mais après des décennies d’hésitation, il était loin d’être évident que les dirigeants du monde réunis pour les négociations de l’ONU sur le climat dans la capitale française s’uniraient pour signer ce qui est désormais considéré comme l’accord international déterminant pour freiner le réchauffement climatique.

Dès le départ, un accord ambitieux n’était « en aucun cas gagné d’avance », a déclaré Laurent Fabius, alors ministre français des Affaires étrangères et président de la COP21.

Le projet de texte comportait « 1 600 passages entre parenthèses », a-t-il déclaré. Soit 1 600 désaccords à régler.

Il lui incombait de répondre aux demandes souvent contradictoires de près de 200 pays – depuis les plus riches émetteurs de pollution due aux combustibles fossiles au monde jusqu’aux nations les plus vulnérables aux impacts climatiques dévastateurs.

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« C’est une course contre la montre. Parce que pendant que toutes ces discussions ont lieu, les émissions continuent », a-t-il déclaré à l’AFP dans un entretien à Paris.

« Et ce que les gens ne réalisent parfois pas, c’est qu’une fois que les gaz à effet de serre ont été émis dans l’atmosphère, il leur faut des années, des décennies, parfois des siècles, pour se dissiper. »

Deux semaines de négociations effrénées ont abouti au désormais célèbre Accord de Paris, dans lequel les pays se sont engagés à maintenir le réchauffement « bien en dessous » de deux degrés Celsius depuis l’ère préindustrielle et à œuvrer pour atteindre la limite plus ambitieuse de 1,5°C.

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Les leçons que Fabius tire de cet accord historique pourraient aider son successeur lors des négociations cruciales de la COP28, qui débuteront aux Émirats arabes unis le mois prochain, alors que les avertissements inquiétants de 2015 commencent à se concrétiser.

Le conseil le plus important à donner au nouveau président de la COP28 est peut-être de travailler dur pour forger un consensus, sans donner l’impression qu’un texte final a été prédéterminé et que les discussions ne sont que « pour le spectacle ».

Les séances de fin de soirée avec les négociateurs à Paris comprenaient le témoignage puissant d’un représentant des Îles Marshall, l’un des nombreux États insulaires de basse altitude risquant d’être engloutis par la montée des mers.

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Pour ce représentant la différence entre 1,5°C et 2°C n’était pas « une question de qualité de vie, c’était une condition de vie ».

Le témoignage a été si puissant, a déclaré Fabius, qu’il était impossible pour les autres gouvernements de rejeter l’argument selon lequel 1,5°C était un objectif plus sûr.

« C’était la vie ou la mort ! » il a dit.

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Après avoir proposé deux premières tentatives pour un texte final, la France a présenté, dès la dernière nuit, une troisième version comportant un texte appelant à limiter le réchauffement à 1,5°C si possible.

« J’ai fait les derniers compromis au milieu de la nuit parce que le texte n’était pas finalisé », a déclaré Fabius, qui préside désormais le Conseil constitutionnel français.

Cela a été accepté.

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« Comme c’est souvent le cas dans les conférences internationales, l’objectif était de trouver une formulation qui permettrait un certain degré d’ambiguïté afin que des personnes ayant des opinions différentes puissent trouver un terrain d’entente », a déclaré Fabius, reconnaissant que cela peut alors poser ses propres problèmes.

Cette année, les pays sont sous pression pour convenir d’objectifs plus stricts en matière de réduction de la dépendance mondiale aux combustibles fossiles, de renforcement de l’efficacité énergétique et des énergies renouvelables, ainsi que d’objectifs plus ambitieux pour réduire les émissions au cours de cette décennie.

La pollution par le carbone doit diminuer de 43 % par rapport aux niveaux de 2019 d’ici 2030. Mais les émissions ont de nouveau augmenté en 2022 et sont en passe de faire de même cette année.

Avec les tensions entre Washington et Pékin, l’invasion russe de l’Ukraine et la guerre entre Israël et le Hamas, la situation géopolitique est plus épineuse aujourd’hui qu’elle ne l’était il y a huit ans.

Mais Fabius a déclaré que jusqu’à présent, la communauté internationale n’avait rien créé de plus efficace que la Conférence des parties (COP) annuelle de l’ONU, et que les négociateurs n’auraient donc qu’à retrousser leurs manches et trouver une solution.

« Si nous n’avons pas les COP, qu’avons-nous ? » il a dit.