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Ces groupes criminels qui appuient Nicolas Maduro

Pour se maintenir à la tête du Venezuela, le successeur de Hugo Chavez compte sur un puissant réseau criminel qui aurait tout à perdre de son éventuelle défaite.

Depuis des années, le régime de Nicolas Maduro s’appuie sur un réseau complexe de groupes criminels qui le soutient en échange de l’accès au territoire et aux ressources. Il s’agit d’un modèle de gouvernance criminelle hybride, selon l’ONG InSight Crime.

Cette alliance, qui a commencé sous le gouvernement de Hugo Chavez (1999-2013), s’est accentuée en 2015 à la suite de la chute mondiale du prix du pétrole et de la dégradation de l’économie du pays.

Les revenus traditionnels ne suffisent plus, le président Maduro s’est tourné vers des rentes criminelles afin de maintenir la loyauté de personnalités politiques et militaires clés, souligne en entrevue Jeremy McDermott, cofondateur et codirecteur d’InSight Crime.

Nicolas Maduro leur a donc attribué des emplois dans des secteurs frontaliers où ils avaient accès au contrôle du trafic de drogue, à la contrebande et à la traite de personnes.

Il a essentiellement créé un système de fiefs un peu partout au pays, s’associant à des groupes criminels afin d’accéder aux rentes qu’ils gèrent.

Une citation de Jeremy McDermott, cofondateur et codirecteur d’InSight Crime

Le gouvernement Maduro leur a ainsi permis de canaliser des ressources et des occasions économiques.

Le plus connu de ces groupes criminels est le Tren de Aragua, un réseau issu de la prison de Tocoron et qui s’est répandu dans toute l’Amérique latine, où il terrorise et exploite les migrants vénézuéliens.

Ces groupes criminels qui appuient Nicolas Maduro

Des migrants vénézuéliens marchent à proximité de Cucuta, en Colombie, le 2 février 2021.

Photo : Getty Images / SCHNEYDER MENDOZA

Il existe une pléthore de petits gangs régionaux, dont plusieurs syndicats qui exploite des mines illégales dans le sud-est du pays. Le paysage criminel est très fluidenote Jeremy McDermott.

Le degré d’implication de ces groupes avec le régime est très variable. Certains coopèrent ponctuellement avec les autorités, alors que d’autres sont complètement imbriqués dans l’État, puisqu’il s’agit en fait d’employés publics qui exploitent leur position pour mener des activités illégales.

Parmi ces groupes, on trouve également des guérillas colombiennes, dont l’Armée de libération nationale (ELN) et la Deuxième Marquetalia (Deuxième Marquetalia), un groupe dissident issu de la démobilisation des Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC).

Les membres de ces guérillas ont fait du Venezuela leur base opérationnelle. Ils y planifient leurs attaques et s’y répliquent ensuite, en plus de faire du trafic de drogue et de la contrebande.

Ils se conviennent de vastes étendues du Venezuela, le long de la frontière colombienne, où ils ont forgé des alliances avec des hommes politiques locaux et des éléments de l’armée.

Une citation de Jeremy McDermott, cofondateur et codirecteur d’InSight Crime

Si Nicolas Maduro reste au pouvoir, ils continueront à profiter de cette base opérationnelle et n’auront aucun intérêt à négocier une éventuelle démobilisation avec l’État colombien, craint le chercheur.

Les collectifs paramilitaires

Depuis des années, le régime s’appuie sur des groupes communautaires armés pour réprimer les activités de l’opposition. Les plus connus d’entre eux, les Groupes de défenseurs de la paix (Cuadrillas Defensoras de la Paz), exercent un contrôle social et politique sur leurs territoires, mais de nombreuses factions sont également impliquées dans l’extorsion, le vol, les enlèvements et le microtrafic, note InSight Crime.

Des partisans du gouvernement en uniforme.

À Caracas, au Venezuela, des miliciens et des partisans de Nicolas Maduro ont protesté contre les mesures économiques imposées par le gouvernement américain (prix photo le 8 juin 2019).

Photo : Getty Images / YURI CORTEZ

Ces groupes, notamment responsables de la distribution de l’aide alimentaire accordée par le gouvernement, l’utilisent pour asseoir leur pouvoir, refusant cette assistance à ceux qui appuient l’opposition. Ce sont aussi eux qui, le jour du vote, harcèlent et intimident les électeurs autour des bureaux de vote.

Nicolas Maduro a poussé un cran plus loin les activités de ces groupes paramilitaires, qu’il a organisé à l’échelle nationale comme troupes de choc politiques, fait observateur M. McDermott, et qu’il pourrait utiliser en cas de besoin si les manifestations vous deviez prendre de l’ampleur.

Ces collectifs, comme les autres groupes criminels, ont tout à perdre d’une défaite de M. Maduro et feront tout ce qu’ils peuvent pour l’empêcher.

Implications géopolitiques

Toutefois, ce ne sont pas les seuls à qui profite de son maintien au pouvoir. En plus de ces groupes, certains dirigeants ont tout intérêt à ce que le Venezuela demeure un État failli pour qu’il ne sorte pas de leur orbite.

La Russie et la Chine ont ainsi salué la victoire de M. Maduro aussitôt qu’elle a été annoncée par le Conseil national électoral, malgré les doutes sur son intégrité.

Les deux hommes se serrent la main.

Le président russe Vladimir Poutine et son homologue vénézuélien Nicolas Maduro lors d’une rencontre, le 5 décembre 2018, à la résidence d’État de Novo-Ogaryovo, à l’extérieur de Moscou, en Russie.

Photo : Reuters / Maxim Shemetov

Les relations entre la Russie et le Venezuela constituent un partenariat stratégiquea déclaré le président russe Vladimir Poutine dans son message de félicitations adressées à M. Maduro.

Je voudrais réaffirmer notre engagement à poursuivre notre coopération constructive sur d’importantes questions bilatérales et internationales. N’oubliez pas que vous êtes toujours un invité bienvenu sur le sol russe.

Une citation de Message de Vladimir Poutine, président de la Russie, à Nicolas Maduro

Moscou et Pékin feront tout en leur pouvoir pour ne pas perdre un partenaire privilégié dans le contexte de la compétition géopolitique mondiale, souligne Rubi Bledsoe, chercheuse au Centre d’études stratégiques et internationales (CSIS) de Washington, ajoutant que l’alliance avec le Venezuela permet à Pékin de contrer l’influence américaine dans la région.

La Chine et la Russie ont été les bouées de sauvetage du régime, explique Mme Bledsoe, notamment en lui fournissant du matériel militaire et des conseils politiques.

Xi Jinping et Nicolas Maduro devant la garde d'honneur chinoise.

Le président vénézuélien Nicolas Maduro et son homologue chinois Xi Jinping passent en revue une garde d’honneur lors d’une cérémonie de bienvenue au Grand Palais du peuple à Pékin, le 13 septembre 2023.

Photo : Associated Press / Liu Bin

En septembre 2023, lors d’une visite d’État à Pékin, le président Nicolás Maduro a annoncé, en conférence de presse avec le président Xi Jinping, l’élévation des relations sino-vénézuéliennes au rang de partenariat stratégique à toute épreuve.

Les deux hommes ont signé une série d’accords bilatéraux de coopération dans les domaines de l’économie, du tourisme, du commerce, de la science, de la technologie, de l’aviation civile et de l’aérospatiale.

La Chine est la principale créancière de Caracas, qui lui doit au moins 14 milliards de dollars.

Sous le coup de sanctions occidentales depuis des années, le Venezuela vend son pétrole à bon prix non seulement à la Russie et à la Chine mais aussi à la Turquie, à la Serbie et à des partenaires privés qui parcourent le monde à la recherche de bonnes affairesfait remarquer Antulio Rosales, professeur adjoint à l’Université de York.

Le Venezuela s’est compromis avec des économies souterraines et dans de nouvelles relations contre-hégémoniques, coûteuses d’un point de vue économique mais qui lui ont permis de survivre aux sanctionsfait observer le chercheur.

Une foule dans la rue.

Des opposants à Nicolas Maduro protestent contre le résultat des élections, à Caracas, le 29 juillet 2024.

Photo : AFP/Getty Images / Raul Arboleda

Les pays occidentaux, qui n’ont pas reconnu la victoire de M. Maduro et qui réclament la publication détaillée des résultats, s’interrogent maintenant sur la stratégie à suivre. Celle-ci pourrait passer par les pays voisins, les principaux concernés par la dérive du Venezuela.

Le Brésil et la Colombie sont des pays clés, note M. Rosales. Non seulement ils représentent des voix importantes de la gauche latino-américaine, mais ils partagent également d’immenses frontières avec le Venezuela et accueillent des centaines de milliers de migrants. Leur influence sera cruciale.

Le Brésil, la Colombie et le Mexique ont d’ailleurs appelé jeudi le gouvernement du Venezuela à publier rapidement le décompte détaillé du examen.

Le principe fondamental de la souveraineté populaire doit être respecté grâce à une vérification impartiale des résultatsont déclaré les gouvernements de ces trois pays dans une déclaration conjointe.

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