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Briser les «deux solitudes» à l’ère du projet de loi 96 au Québec

Les « deux solitudes », cet enchevêtrement du Canada français et anglais, ne sont pas que de l’histoire. Pas seulement des chars sur la colline du Parlement en 1970. Ni un René Lévesque fumant à la chaîne en agitant en 1980. Ou des drapeaux canadiens serrés dans les poings au Rassemblement pour l’unité de Montréal en 1995.

Non, nonles deux solitudes persister. Ces « vieux griefs qui ne semblent jamais mourir » sont un quotidien. Surtout si vous vous retrouvez à parler français à l’extérieur des frontières du Québec, ou à ne pas parler français à l’intérieur.

Le projet de loi 96, la nouvelle loi linguistique litigieuse du Québec, limite l’utilisation de l’anglais dans les tribunaux, les soins de santé et d’autres services publics. Les dissidents soutiennent qu’il s’agit « d’un véritable test de réconciliation », imposant une deuxième langue coloniale aux nations autochtones souveraines. Ou des réfugiés, fraîchement traumatisés d’Afghanistan et d’Ukraine, qui ont six mois pour apprendre le français. Parallèlement à la loi 21, qui crée « une deuxième classe de citoyenneté » pour les femmes musulmanes en particulier, la loi 96 consacre les inégalités. La langue, semble-t-il, n’est qu’une des nombreuses solitudes du plumage colonial du Canada.

Historiquement, les lois linguistiques au Canada ont été dévastatrices et, bien sûr, ont ciblé ceux d’entre nous qui ne parlent pas anglais. Je comprends cela intimement – je suis le descendant de grands-parents qui se sont pliés et pliés au règlement 17 en Ontario, une loi qui visait à éradiquer le français par l’éducation au tournant du 20e siècle. D’où je viens, parler français est un geste politique. Un geste de résistance. Celui qui dit nous sommes, nous serons — nous sommes, nous serons.

Ce qui est souvent perdu dans la traduction dans les discussions plus larges sur la loi linguistique, c’est que la francophonie canadienne n’est pas seulement québécoise. De St-Boniface au Manitoba, en passant par Sudbury en Ontario, jusqu’à Grand-Pré en Nouvelle-Écosse, nos communautés débordent de ce que plusieurs imaginent être le Canada francophone. Nous avons nos propres cultures locales, riches de notre propre poésie et chanson. Nos propres accents régionaux et créatifs Speaking. Nos propres histoires et préoccupations politiques qui reflètent les réalités de ce que c’est que d’être francophone hors Québec.

Avec des racines du Canada français à l’Afrique, du Moyen-Orient aux Caraïbes, et des endroits intermédiaires, la francophonie canadienne est également de plus en plus multiraciale, multiculturelle et multiconfessionnelle. Nous partageons l’histoire et les liens familiaux avec les peuples des Premières Nations, les Inuits et les Métis, et nombre d’entre nous sont engagés dans l’important et humiliant travail de vérité et de réconciliation avec « tous nos proches », dont nous devons célébrer et honorer les propres parcours vers la réappropriation linguistique.

francophones — surtout ceux d’entre nous qui se considèrent comme peuple fondateur — un peuple fondateur du Canada — doit porter un regard sans faille sur la façon dont nous participons, perpétrons et profitons des systèmes d’oppression et de colonialisme au Canada. La réconciliation en particulier doit être défendue. Le racisme, la discrimination sexuelle et l’islamophobie, remis en question. L’érosion des droits fondamentaux de la Charte, contestée.

Comme un peuple fondateur, nous avons beaucoup de travail à faire. Le projet de loi 96 déshonore notre héritage, les leçons que nous — en tant que francophones — avons apprises avec beaucoup de douleur au cours des siècles de l’histoire coloniale du Canada, lorsque nos ancêtres ont été déportés, nos fermes incendiées, nos héros pendus, nos enfants forcés d’apprendre en anglais , nos aspirations tenues en confiance par des générations de aïeux et aïeules (nos ancêtres).

Le français devrait-il être protégé au Canada? Oui.

Mais considérons aussi la pluralité naissante des francophones au Canada — et comment, par la nature même de nos expériences de plus en plus diversifiées, nous pouvons montrer la voie pour briser les solitudes.

Cela mérite assurément la protection du Canada.