Allégations de racisme à l’Assemblée | Haroun Bouazzi persiste et signe
(Québec) Haroun Bouazzi fait fi du rappel à l’ordre de Ruba Ghazal et Gabriel Nadeau-Dubois. Il persiste et signe et affirme que le gouvernement Legault et le Parti québécois présentent l’« Autre » comme quelqu’un de dangereux ou d’inférieur.
« Quand je dis quotidien, c’est quotidien », a laissé tomber le député de Maurice-Richard vendredi matin lors d’une longue entrevue au micro de Patrick Masbourian, à Radio-Canada.
« La dernière semaine, M. Carmant était dans l’eau chaude, il nous a expliqué à une question au salon bleu, sur les intervenantes qui ont couché avec des mineurs dans la DPJ, et il finit par nous dire, c’est la faute des immigrés », a affirmé M. Bouazzi.
Parmi les autres exemples en rafale cités par M. Bouazzi :
- Le ministre de la Santé Christian Dubé attribue l’allongement des listes d’attente en chirurgie aux immigrants.
- Le PQ et la CAQ s’inquiètent de l’élection de Donald Trump aux États-Unis que sous la lorgnette de l’arrivée massive de réfugiés.
La seule réaction des portes-parole de la CAQ et du PQ, c’est une attention portée à la réception des immigrants, c’est une catastrophe. Le PQ parlait de millions de personnes.
Haroun Bouazzi, député solidaire de Maurice-Richard
Il estime que cette « accumulation » crée « l’« Autre » comme étant un danger pour le Québec ».
Carmant n’accepte pas
Le ministre responsable des services sociaux Lionel Carmant a immédiatement réagi sur les médias sociaux. « Jamais je n’accepterai qu’on m’accuse d’attiser le racisme. Je suis un fier Québécois d’origine haïtienne. Haroun Bouazzi dépasse les bornes. Québec solidaire doit réagir immédiatement », at-il tonné.
L’échange auquel fait probablement référence M. Bouazzi s’est déroulé il ya deux semaines. La libérale Brigitte Garceau interrogeait M. Carmant sur les propositions du premier ministre François Legault, qui a affirmé à ce moment que l’explosion de l’immigration temporaire avait un effet sur les services offerts par la DPJ. « Hier encore [François Legault] a affirmé que l’immigration était la cause de cette crise. Vraiment ? Est-ce que c’est l’immigration qui a agressé des mineurs en centre jeunesse ? », a demandé M.moi Garceau.
M. Carmant a rétorqué qu’à son « grand désespoir », il y a des gens « qui partent d’Amérique du Sud, des Caraïbes, qui traversent les États-Unis à pied, à pied, avec leurs enfants, qui arrivent au Québec, et, à cause de leur état, la DPJ est appelée et doit intervenir dans ces cas-là ». « J’ai demandé, c’est qu’on intervienne avec les services sociaux, avec les organismes communautaires, qu’on modifie notre façon d’intervenir pour s’assurer que ces enfants-là puissent rester dans leurs familles. [Ce] qu’on souhaite, là, c’est que les gens qui arrivent au Québec contribuent à la société québécoise du mieux possible », at-il dit.
À la suite de l’entrevue qu’il a donnée à Radio-Canada, le caquiste Simon Jolin-Barrette et le péquiste Pascal Bérubé ont demandé à Gabriel Nadeau-Dubois et Ruba Ghazal d’agir.
Rappel à l’ordre
Mais M. Bouazzi est-il prêt à écouter ? Déjà, la veille, la future co-porte-parole de Québec solidaire Ruba Ghazal a rappelé M. Bouazzi à l’ordre pour des propos qu’elle juge « franchement maladroits et exagérés », en pointant du doigt un discours qu’il a tenu la semaine précédente où il affirmait qu’il voyait « à l’Assemblée nationale tous les jours la construction de cet autre, de cet autre qui est maghrébin, qui est musulman, qui est noir, qui est autochtone, et de sa culture qui, par définition, serait dangereuse ou inférieure ».
Elle avait affirmé que Gabriel Nadeau-Dubois et elle avaient eu « une bonne discussion avec Haroun [jeudi] matine ». « Nous lui avons exprimé que ses propositions étaient franchement maladroits et exagérés », at-elle écrit.
Puis, en entrevue au DevoirM. Nadeau-Dubois a affirmé que les propositions de M. Bouazzi étaient polarisantes.
En entrevue ce matin, le député de Maurice-Richard a dit respecter la prise de position de ses deux co-porte-parole, et dit comprendre que « sur la forme, ils peuvent avoir des malaises ». Durant cet entretien, il explique toutefois qu’il a « une responsabilité » de faire la « pédagogie sur comment on construit l’autre comme étant dangereux ». « Parler de racisme au Québec, ça prend beaucoup de courage », dit-il.
Québec solidaire se réunit en congrès toute la fin de la semaine. Le débat soulevé par M. Bouazzi va s’y prolonger.
En point de presse en fin de journée à Montréal, Gabriel Nadeau-Dubois a soutenu qu’il était en désaccord avec les déclarations de M. Bouazzi, mais que ce dernier avait une liberté de parole. Le chef parlementaire du parti ne lui demandera pas de s’excuser. Il a toutefois reconnu que le caucus du parti devra trouver une position commune sur cette question, et qu’il a rencontré le député de Maurice-Richard vendredi pour discuter de ses déclarations à Radio-Canada. Du même souffle, il a lancé un « appel au calme », et a affirmé que le député Bouazzi a dû fermer son bureau de circonscription aujourd’hui en raison d’un « déferlements » de commentaires menaçants.