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Revue « Bande originale d’un coup d’Etat » : Jazz, politique africaine

La décolonisation reçoit le traitement ultime à l’aiguille dans le documentaire « Bande originale d’un coup d’État » du cinéaste belge Johan Grimonprez. Il s’agit d’un collage éblouissant et musical d’images, de mots et de sons, racontant le moment de la guerre froide où l’indépendance congolaise, le jazz brûlant et les tensions géopolitiques ont fait entendre un son partout dans le monde. Mais aussi comment cette musique a été étouffée par les instruments mortels du capitalisme et du contrôle, toujours un facteur sur la scène mondiale.

Construit autour d’acteurs influents de l’époque, à la fois célèbres (le juste Malcolm X, le calculateur Daj Hammarskjöld) et cachés (espions, mercenaires engagés), le résultat est une mixtape d’archives captivante et profondément documentée avec l’ampleur d’une épopée d’époque, l’âme d’une marche activiste. et l’énergie palpitante d’un thriller cape et poignard. C’est une histoire racontée avec des rythmes, des blues et des voix, mais aussi avec du texte à l’écran avec des citations, comme si les pages étaient tournées. L’effet, bien que long (deux heures et demie), est onirique mais propulsif, une chronologie à la fois optimiste et sinistre. (Une interview d’une franchise blasée avec le chef de la CIA, Allen Dulles, le fait passer pour un méchant de Bond.)

Le récit organisateur du film oscille entre les machinations à l’ONU, où les railleries de Khrouchtchev accompagnaient un bloc afro-asiatique émergent, jusqu’à l’échiquier violent qu’était le Congo nouvellement indépendant et le bref mandat rongé par l’espionnage de son premier Premier ministre. , Patrice Lumumba, le paratonnerre des indépendances africaines. Ce que « La bande originale d’un coup d’État » montre clairement à travers le bilan de Grimonprez avec les ruines coloniales de son propre pays, c’est que la Belgique – avec l’aide des services de renseignement américains et britanniques – n’avait pas l’intention de donner à Lumumba une chance de prendre pied.

En chemin, nous rencontrons des personnalités clés comme la militante et conseillère panafricaine redoutée et décriée Andrée Blouin (ses extraits de ses mémoires sont lus par le musicien Zap Mama) et écoutons les souvenirs poétiques de l’auteur congolais In Koli Jean Bofane (le seul original du documentaire riche en clips) interview), un enfant au moment où son pays se séparait.

Nous obtenons également un large échantillon électrisant des jams de liberté de l’époque, qu’ils proviennent des platines et des radios de nos côtes ou de la scène de la rumba africaine. Abbey Lincoln hurle dans la suite « Freedom Now » de Max Roach, le son urgent de Nina Simone est entendu partout et des morceaux significatifs de Monk, Coltrane, Duke, Dizzy et Miles sont tous éclairés, souvent en juxtaposition significative avec les événements et les émotions du récit.

Après tout, c’était une époque où de grands noms du jazz comme Louis Armstrong et Melba Liston étaient envoyés comme ambassadeurs culturels dans les régions postcoloniales d’Afrique, pour se rendre compte qu’ils n’étaient qu’un écran de fumée pour des opérations secrètes destinées à saper des mouvements comme celui de Lumumba et à protéger les intérêts des multinationales dans le monde. les minéraux précieux de la région comme l’uranium. C’était la musique comme message, les artistes comme distractions. Mais le meurtre de Lumumba en 1961, après des mois de complot mené par des agents américains, belges et congolais (et tacitement approuvé par le président Eisenhower), a sonné le glas de la façade occidentale. C’était le début d’un nouvel effort fougueux en faveur des droits de l’homme.

Le mois suivant, Roach et Lincoln ont aidé à organiser une manifestation devant le Conseil de sécurité de l’ONU. Cette convergence fâcheuse du jazz et de la politique est ce qui clôture l’enquête de Grimonprez, axée sur les coffres-forts et soucieuse des médias, et donne le ton au tissu conjonctif de qui est qui. Dans son tourbillon audiovisuel d’indignation, « La bande originale d’un coup d’État » — l’un des meilleurs documentaires de l’année — n’est que de profondes coupures.

« Bande originale d’un coup d’État »

En anglais, français, russe et néerlandais avec sous-titres anglais

Non noté

Durée de fonctionnement : 2 heures et 30 minutes

Jouant: Ouverture le vendredi 15 novembre au Landmark’s Nuart Theatre

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