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Un pluralisme de façade plombe les élections indiennes

Selon les sondages, la coalition des partis d’opposition indiens ne semble pas avoir convaincu l’électorat de laisser tomber l’actuel premier ministre, Narendra Modi. Pourtant, ce regroupement, baptisé INDE, réunit un nombre impressionnant de 40 partis politiques — des communistes à l’extrême droite, en passant par des partis musulmans et d’autres regroupements politico-religieux.

Le seul point commun : un désir de détrôner le parti de droite nationaliste hindou Bharatiya Janata Party (BJP) et son chef.

Au cours de ce marathon électoral qui durera plus d’un mois (d’aujourd’hui, 19 avril, jusqu’au 1euh juin prochain), c’est davantage la logistique que les allégeances politiques qui mettent des bâtons dans les roues de l’alliance des partis d’opposition. Organisateur des cours à candidat unique pour faire gagner les députés des différents partis dans les 543 circonscriptions indiennes est plus facile à dire qu’à faire. Il s’agit de l’électorat le plus important du monde, soit 969 millions de personnes se rendant aux urnes, dépassant la population totale de l’Union européenne.

Un sondage calcule que le BJP et Modi pourraient gagner jusqu’aux trois quarts des sièges de la Lok Sabha (la « chambre du peuple », semblable à l’Assemblée nationale). Son objectif est d’obtenir 400 sièges sur 543 afin d’asseoir encore un peu plus sa mainmise sur l’électorat du pays le plus populeux du monde.

Et bien qu’il existe plus de 2500 partis politiques en Inde, il s’agit d’un pluralisme de façade, puisque seulement 10 partis détiennent 86 % des sièges de la Lok Sabha. Même le parti du Congrès national indien, le plus vieux parti politique du pays, n’arrive pas à établir un leadership efficace dans l’organisation de l’opposition. Le parti de Jawaharlal Nehru, puis de sa fille Indira Gandhi, a pourtant dirigé le pays pendant plus des deux niveaux des années après l’indépendance du pays en 1947.

Les chiffres d’appui au BJP viennent notamment du fait que celui-ci muselle ses adversaires par différentes tactiques juridiques qu’Amnistie internationale qualifie de « répression politique contre l’opposition ».

Ainsi, le ministre en chef de Delhi, Arvind Kejriwal, critique notoire du gouvernement, a été arrêté pour blanchir d’argent à la mi-mars, et le parti du Congrès national indien accuse le gouvernement d’avoir gelé ses comptes bancaires sous l ‘égide d’une dispute fiscale datant de 2018. Fait intéressant : certaines poursuites judiciaires contre des partis d’opposition ont été abandonnées lorsque ceux-ci se sont joints à la coalition du BJP.

Les jambes de Modi

Se présentant comme un homme du peuple et le fils d’un vendeur de thé du Gujarat, Narendra Modi avait annoncé lors de sa première élection comme premier ministre, en 2014, que « les bons moments arrivent » (« les bons moments arrivent »). les bons moments arrivent »). La prophétie s’est-elle réalisée ?

D’un côté, l’économie a presque doublé depuis 2014 et la valeur du marché boursier indien s’est multipliée par trois, des exploits appréciés des banques internationales comme Morgan Stanley et JPMorgan Chase. La vente des biens de luxe, comme les voitures haut de gamme, a également augmenté, créant même des listes d’attente dans certains secteurs. L’Inde serait récemment devenue la cinquième économie mondiale, dépassant ainsi le Royaume-Uni, et elle pourrait dépasser le Japon et l’Allemagne dans les prochaines années pour devenir troisième, derrière les États-Unis et la Chine.

De l’autre côté, le chômage atteint 50 % chez les 20 à 24 ans, et les inégalités économiques ont augmenté depuis 2014. Alors que Narendra Modi a étendu plusieurs prestations sociales et offert des dons de denrées et d’objets technologiques de base aux tranches les plus pauvres de la population, l’Inde a encore le taux de pauvreté le plus haut de la région — environ 12 % de sa population, selon les données officielles. Exemple de l’indice de développement humain encore bas dans le pays : sur 1000 bébés nés en 2022, 30 sont morts avant leur cinquième anniversaire.

De plus, la qualité de la démocratie indienne a perdu une vingtaine de rangs au classement mondial entre 2016 et 2020, alors que la cote de pays de la même région, comme le Népal ou le Bhoutan, a augmenté. Bien qu’il soit exagéré de dire que le régime indien soit devenu autoritaire, certains experts affirment que le pays dérive vers une « autocratie électorale » ou un système hybride « performant-autoritaire ».

L’un des aspects les plus évoqués des deux mandats de Narendra Modi au pouvoir est d’avoir laissé augmenter — ou même encourager — les sentiments antimusulmans et antichrétiens dans ce pays à majorité hindoue. En janvier dernier, le BJP est allé de l’avant avec la construction d’un temple en hommage au dieu-roi hindou Rāma sur le site d’une mosquée du XVIee siècle ayant été détruite par une foule hindoue en 1992. Cela a jeté de l’huile sur les braises encore chaudes des velléités entre hindous et musulmans, surtout dans la province du Gujarat, que Modi a dirigé de 2001 à 2014.

La rhétorique nationaliste et pro-hindoue obtient bien sûr un très grand succès auprès de l’électorat du BJP, tout comme des promesses comme celle de changer le nom du pays pour favoriser la version en sanscrit, Bharat, utilisée par les locuteurs de langue hindie . Bien que parler hindi ne signifie pas être de confession hindoue, ces tactiques d’hindouisation du pays satisfont la majorité des électeurs indiens, dont environ 43 % ont l’hindi comme langue maternelle.

Pourtant, bien que l’Inde soit composée à près de 80 % de personnes s’identifiant à la religion hindoue, le pays compte les plus grandes populations de sikhs et de jaïns, la troisième population musulmane et la quatrième population bouddhiste du monde. Car l’Inde est si populeuse que même les minorités représentent d’immenses quantités de personnes.

Un troisième mandat pour le BJP pourrait lui permettre d’instaurer un peu plus son idéologie de l’Hindutva (hindouité), soit le renforcement d’un État-nation hindou.

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